Confiscation, Curatelle de Faillite et Action Révocatoire : La Cour de Cassation et l'Arrêt 19469/2025

Le paysage juridique italien est constamment animé par des arrêts qui délimitent les frontières entre différentes branches du droit, souvent appelées à se confronter sur des questions de première importance. L'une de ces intersections, particulièrement complexe et délicate, concerne la relation entre les mesures de prévention patrimoniale – instruments visant à soustraire des biens à la disponibilité de sujets dangereux pour la sécurité publique – l'action révocatoire ordinaire et les procédures collectives, en particulier la faillite. C'est dans ce contexte que s'inscrit l'arrêt récent n° 19469, déposé le 26 mai 2025 par la Cour de Cassation, présidée par le Dr G. D. A. et rapporté par le Dr B. P. R., qui offre des éclaircissements fondamentaux.

L'Affaire Soumise à la Cour Suprême : Entre Saisie, Confiscation et Révocation

La question examinée par la Cour de Cassation trouve son origine dans une procédure impliquant la S. F. S.r.l. L'essence du litige tournait autour de l'opposabilité d'une sentence de révocation ordinaire, rendue après la confiscation d'un bien, à l'égard d'une curatelle de faillite. Cette dernière, bien qu'admise au passif d'une procédure de prévention patrimoniale, n'avait jamais été appelée à intervenir dans la procédure de prévention qui s'était conclue par la confiscation du bien. La curatelle s'était limitée à poursuivre le procès civil jusqu'à l'admission de l'action révocatoire, dans le but de récupérer le bien pour la masse de la faillite.

La Cour d'Appel, confirmant la décision du Tribunal de Rome du 11 novembre 2024, avait rejeté les arguments de la curatelle. La Cour de Cassation a été appelée à se prononcer sur la légitimité de cette décision, abordant la question cruciale de la prévalence entre les décisions du juge de la prévention et celles du juge civil en matière d'action révocatoire.

La Maxime de la Cour de Cassation et le Rôle du Juge de la Prévention

La Cour Suprême, par l'arrêt n° 19469/2025, a rejeté le recours, établissant un principe de droit de grande importance. Voici la maxime qui résume le cœur de la décision :

En matière de mesures de prévention, la curatelle de faillite admise au passif d'une procédure de prévention patrimoniale, jamais appelée à intervenir dans la procédure y afférente conclue par la confiscation d'un bien saisi après la transcription de la demande de révocation et s'étant donc limitée à poursuivre le procès civil jusqu'à l'admission de l'action, ne se voit pas opposer la sentence de révocation ordinaire rendue après la confiscation, le seul juge de la prévention étant fonctionnellement compétent pour vérifier les droits qui lui sont opposables. (Dans la motivation, la Cour a également affirmé que l'avènement de la saisie et de la confiscation subséquente rend indifférent, en l'absence d'une évaluation contraire du juge de la prévention, l'admission de la demande de révocation, ni n'entraîne la rétrocession du bien).

Cela signifie qu'une fois la confiscation intervenue dans une procédure de prévention, la sentence de révocation ordinaire, même si obtenue ultérieurement par la curatelle de faillite, ne peut être opposée pour récupérer le bien. La Cour de Cassation réaffirme que le juge de la prévention est le seul organe fonctionnellement compétent pour évaluer les droits qui peuvent être exercés sur les biens faisant l'objet de confiscation. L'avènement de la saisie et de la confiscation subséquente rend, de fait, sans objet l'admission de la demande de révocation, à moins qu'il n'y ait une évaluation spécifique contraire de la part du juge de la prévention. Le bien, une fois confisqué, ne rétrograde pas à la disponibilité du sujet ou de la masse de la faillite du fait d'une sentence révocatoire civile.

Le Contexte Normatif : Le Code Antimafia et la Protection des Tiers

La décision se fonde sur le cadre normatif défini par le Décret Législatif 6 septembre 2011, n° 159, le soi-disant « Code Antimafia », en particulier les articles 54, 55 alinéa 3, 59 et 61. Ces articles régissent les procédures de prévention patrimoniale, la saisie, la confiscation et les modalités de protection des tiers. Le Code Antimafia prévoit un mécanisme spécifique pour la vérification des droits de créance et réels revendiqués par des tiers sur les biens saisis et confisqués, attribuant au juge de la prévention la compétence exclusive pour cette évaluation. L'objectif est double :

  • Garantir l'efficacité des mesures de prévention dans la lutte contre la criminalité organisée.
  • Assurer que les droits des tiers soient examinés dans un contexte qui tienne compte des spécificités de la procédure de prévention, en évitant les conflits de juridiction ou les décisions contradictoires.

La Cour a ainsi réaffirmé que l'action révocatoire, bien qu'étant un instrument légitime de protection pour les créanciers en droit civil et de faillite, ne peut surpasser la force d'ablution de la confiscation de prévention, qui a sa propre fonction publiciste autonome et prééminente.

Conclusions : Un Équilibre Nécessaire entre Protection Patrimoniale et Droit de la Faillite

L'arrêt n° 19469/2025 de la Cour de Cassation représente un point d'ancrage dans l'interaction complexe entre les mesures de prévention patrimoniale et le droit de la faillite. Il clarifie que la prééminence de la confiscation de prévention, une fois devenue définitive, prévaut sur les décisions ultérieures de révocation ordinaire, si la curatelle n'a pas participé activement à la procédure de prévention pour faire valoir ses droits devant le juge compétent. Ce principe renforce l'idée que la protection des tiers sur les biens faisant l'objet de mesures de prévention doit être exercée au sein même de la procédure de prévention, devant son juge naturel. Pour les professionnels du droit et pour les entreprises, cet arrêt souligne l'importance d'une évaluation attentive des procédures et des délais pour la protection de leurs droits dans des contextes impliquant des mesures de prévention patrimoniale, mettant en évidence la nécessité d'une approche intégrée et rapide pour éviter la perte d'opportunités de récupération des biens.

Cabinet d'Avocats Bianucci