Appel pénal et preuve déclarative : l'impact de la Cassation n° 15874/2025 sur l'art. 603, al. 3-bis c.p.p.

L'ordonnancement procédural repose sur un équilibre délicat entre l'exigence de stabilité des décisions d'acquittement et le droit de l'accusation à solliciter un nouvel examen dans le cadre du jugement d'appel. L'arrêt récent n° 15874/2025 de la Cour de cassation – Troisième Chambre pénale – intervient précisément sur ce point, clarifiant quand l'appel du Procureur de la République peut être considéré comme recevable en l'absence d'indication des témoins à réexaminer. Le sujet concerne l'interprétation de l'art. 603, alinéa 3-bis c.p.p., introduit par la « réforme Cartabia » pour limiter les renversements en appel des décisions d'acquittement basés sur une évaluation différente des preuves déclaratives.

Le périmètre normatif de l'art. 603, al. 3-bis c.p.p.

La norme impose au juge de second degré, s'il entend écarter une décision d'acquittement en se fondant sur une considération différente de la crédibilité des témoins ou des prévenus, de procéder à la réouverture de l'examen. La disposition, cependant, ne réglemente pas expressément le contenu de l'acte d'appel, qui continue d'être régi par l'art. 581 c.p.p. (motivation, conclusions et, pour le Procureur de la République, indication du dispositif contesté).

Le principe affirmé dans l'arrêt n° 15874/2025

En matière d'appel, l'omission d'indiquer les déclarants à examiner dans le cadre du jugement de second degré ne constitue pas une cause d'irrecevabilité du recours du ministère public contre la décision d'acquittement pour des motifs relatifs à l'évaluation de la preuve déclarative, car la disposition de l'art. 603, alinéa 3-bis, cod. proc. pén. ne réglemente pas les modalités de l'appel, mais fixe une règle procédurale qui doit être observée par le juge de second degré en cas de renversement d'une décision d'acquittement sur la base d'un appréciement différent de la crédibilité des preuves déclaratives.

La Cour, rappelant des précédents conformes (Cass. S.U. n° 14426/2019 ; n° 11586/2022), précise que l'art. 603, al. 3-bis n'impose pas une charge supplémentaire de « précision des témoins » dans le corps de l'acte d'appel. Le requisito, en effet, concerne la phase décisionnelle et incombe au juge, appelé à ordonner la réouverture de l'instruction s'il entend renverser l'acquittement pour des raisons liées à la crédibilité des déclarations.

Conséquences opérationnelles pour la défense et l'accusation

La décision commentée offre quelques indications utiles :

  • Le Procureur de la République peut concentrer l'acte d'appel sur la critique de l'évaluation probatoire sans avoir à identifier nommément les témoins à réentendre.
  • La défense de l'accusé conserve néanmoins la possibilité d'invoquer, en second degré, l'éventuel défaut de réouverture de l'examen si le juge entend condamner.
  • Le juge d'appel, s'il souhaite renverser l'acquittement, devra motiver sur la nécessité de rouvrir l'instruction et procéder à l'examen direct des déclarants, sous peine de violation de l'art. 603 c.p.p. et d'un potentiel cassation.

En substance, la pratique rédactionnelle de l'acte d'appel ne change pas : la spécificité des motifs et le renvoi précis aux éléments probatoires sur lesquels repose la demande de réforme restent centraux.

Conclusions

L'arrêt n° 15874/2025 réaffirme que le filtre de recevabilité de l'appel repose encore sur les exigences de l'art. 581 c.p.p., sans chevauchement avec l'art. 603, al. 3-bis. Cela renforce la distinction entre la phase d'appel et la phase décisionnelle : la première concerne la présentation des motifs, la seconde la « réouverture » éventuelle des preuves déclaratives. Pour les professionnels du barreau, l'enseignement est double : le Procureur de la République ne voit pas ses pouvoirs d'appel compressés, tandis que la défense pourra veiller à ce que toute éventuelle révision de la crédibilité des témoins se fasse dans le respect du contradictoire. Le principe contribue à rendre le jugement d'appel plus prévisible, en posant des limites aux contestations purement formelles et en concentrant l'examen de la Cour de cassation sur des questions de garantie effective.

Cabinet d'Avocats Bianucci